Saturday 9 June 2007

Sacrilège!

Dans un article paru le 8 juin 2007 dans le quotidien Le Temps, le journaliste Ridha Kefi (correspondant de Jeune Afrique) ose distiller quelques critiques au parti au pouvoir, le RCD. Fais très rare, et peut être inimaginable pour certains, cette initiative est à remarquer et apprécier. Espérons que d'autres suivront.

Je ne dis pas une bêtise en affirmant que la scène politique tunisienne est outrageusement dominée depuis l'indépendance du pays, en 1956, par le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD). (...) Le RCD, parti-Etat s'il en est, ou qui se confond à l'Etat auquel il a historiquement donné naissance, continue de dominer, sous une façade de pluralisme arithmétique, les partis existants ou, à défaut, de les affaiblir, en suscitant en leur sein divisions, dissidences et scissions, de manière à les empêcher de se développer, d'agrandir leur base et de constituer un pôle d'opposition capable de mobiliser les foules autour d'un nouveau projet national. Ce parti de masse domine aussi les grandes organisations nationales, notamment l'UTICA (syndicat patronal), l'UNFT (principale organisation féminine) et l'UNAT (syndicat agricole), tout en étant fortement présent dans les structures de l'UGTT (centrale ouvrière).

On peut déplorer cette domination ou la considérer comme l'une des causes de la faiblesse chronique de l'opposition et, par conséquent, de la lenteur de la transition démocratique tunisienne. Mais peut-on sérieusement reprocher au RCD sa mainmise sur la scène politique nationale ? C'est de bonne guerre, pourrait-on dire. Et il serait naïf de croire qu'un parti au pouvoir, et qui est si fortement implanté dans les rouages de la société et de l'Etat, puisse céder, spontanément et volontairement, des pans de son pouvoir à des partis rivaux ou qui s'affichent comme tels. Le problème, on l'a compris, n'est pas dans la puissance du RCD, mais dans la faiblesse de ces soi-disant partis de l'opposition.
(...) Sous cette appellation, nous trouvons des partis dits d'opposition légale, qui sont en réalité des partis satellites, ou progressivement satellisés, sans réelle envergure, et dont le rôle a consisté jusque là à servir de sparring partners - ou d'alibis démocratiques, selon certains -lors des joutes électorales, toujours remportés sans coup férir par le parti au pouvoir.

(...) Je ne parle pas ici du RCD, qui a su régénérer ses forces et se mettre au goût du jour, n'hésitant pas, par pragmatisme et opportunisme, à s'approprier certains concepts jadis agités par l'opposition (pluralisme, solidarité sociale, Etat de droit...)

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