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Saturday, 19 May 2007

La Tunisie, laïque? (bis)

L’expérience tunisienne dans le domaine de la liberté religieuse la rapproche beaucoup du concept de la laïcité tel qu’il est appliqué en France ou en Turquie. Que ce soit dans les rapports entres les gens, dans leurs habitudes et même dans l’organisation générale de la vie publique, l'aspect religieux est très discret et à peine remarqué par le visiteur étranger. Alors, avons-nous vraiment besoin de franchir cette ligne fatale et de balancer notre patrie dans le club, encore très minoritaire, des pays laïcs ? Ne courons-nous pas le risque de déclencher une tornade au sein de la société, pour rien ? Car finalement, qu’apporterait la laïcité à notre pays ? plus de démocratie ? un souffle de liberté ? ou une plus grande visibilité internationale ?
Voici un texte que je trouve convaincant de Tariq Ramadan qui traite de ce sujet :

"La première évidence, qu’il faut absolument contester, est le fait, dans le monde arabo-musulman, pour ne prendre que cet exemple, que tous les « laïcs » sont forcément démocrates. Encore une fois, l’équation simplificatrice qui stipule que dès que l’on défend la laïcité on est forcément démocrate, est non seulement un simplisme politique mais l’utilisation d’une symbolique dont on sait qu’elle fonctionne en Occident. Cela a permis à des gens de justifier au nom de leur référence à la laïcité leur soutien inconditionnel à des dictatures, c’est vrai dans toute l’Afrique du Nord.

Deuxièmement, il est de la même façon faux de dire que tous les démocrates sont forcément « laïcs » au sens où ils se référeraient à cette notion aujourd’hui dans le monde musulman. Vous avez des dynamiques qui ne se référent pas à ce terme -parce qu’elles tiennent à rester en communication avec l’univers symbolique musulman - mais qui sont plus démocratiques que les autres. Cela ne veut pas dire, encore une fois, qu’il faille simplifier les choses, mais les références à une terminologie ne sont pas une garantie de l’attitude politique démocratique dans le monde arabe ou musulman en général.

Troisièmement, il est faux aussi de dire que tous les courants que l’on nomme « islamistes » sont par nature et par essence opposés à des articulations de la laïcité."
Personnellement, je doute que l’instauration de la laïcité puisse apporter quoique ce soit à notre pays, dans l’état actuel des choses. La population a atteint une maturité non négligeable dans sa conception de la pratique religieuse et dans la distinction entre la sphère privée et la sphère publique, et cela devrait suffir pour le moment.
Cependant, ceux qui sont tentés par la laïcité veulent apporter une mauvaise réponse à une question délicate : que faire pour affronter cette montée en puissance du sentiment islamiste et intégriste parmi les jeunes ?
Malheureusement, rajouter une ligne à la constitution stipulant le principe de la laïcité ne changerait rien.

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Friday, 18 May 2007

La Tunisie, laïque?

L'immobilisme apparent de la société tunisienne cache dans ses entrailles des mutations aussi profondes que radicales. Il y a surtout deux points de vue, deux orientations qui se disputent le droit de guider et représenter la jeunesse tunisienne, car chacun sait qu'elle ne reconnaît aucune légitimité au pouvoir en place.
Il s'agit de la mouvance islamiste, englobant modérés et radicaux, et de la mouvance laïque, comprenant les différents courants sociaux et libéraux. L'une comme l'autre se targue d'être démocrate, pourfende le régime, et essaie d'avoir une visibilité au sein de l'opinion tunisienne. Et chacun d'eux, ridiculise l'autre, insiste sur ses dangers, et les qualifie d'intégristes pour les uns, et d'impies pour les autres. Voici un avis que je trouve pertinent :

En 2007, la menace qui nous guette réside essentiellement dans les forces rétrogrades et passéistes qui sont prêtes à utiliser la force pour conquérir le pouvoir. Le grand danger de ces gens, c’est qu’ils n’ont pas le même rapport au temps. Ils vivent dans un temps immobile et leur seule référence est historique. Ils puisent leur légitimité dans un passé qu’ils embellissent de toutes les vertus et qu’ils idéalisent pour cultiver une nostalgie qui n’a pas lieu d’être. Ils passent leur vie à ânonner des vérités qui n’en sont plus car tombées en désuétude. Ils s’enferment dans un passé, une forme d’apartheid culturel volontaire, dans lequel on ferme les frontières de son intelligence, on cadenasse son esprit, on veut avoir raison, on est convaincu de sa propre supériorité… On croit tout savoir et on se ferme à toutes les compréhensions nouvelles apportées par la science, mais il faudra bien accepter d’intégrer dans sa réflexion ce que nous savons maintenant avec certitude de nos origines et de nos évolutions. Le grand handicap de tous ces replis culturels consiste à entrer dans sa coquille, frileux et timoré, en refusant de perdre ses repères ancestraux et en cultivant une identité passéiste.

Il ne s’agit pas de perdre sa foi, ni sa croyance en Dieu, il s’agit d’élargir sa compréhension pour percevoir l’ensemble de l’humanité comme un ensemble unique qui vit un destin commun. Il s’agit de voir le Noir, le Blanc, le Jaune comme des êtres de même origine, il s’agit de considérer le Juif, le Chrétien, le Bouddhiste, l’agnostique, l’athée comme appartenant à la même confrérie humaine et que nul n’a raison sur l’autre. Le grand défi qui se posera à l’intelligence humaine sera d’intégrer ces évidences comme les fondements de sa réflexion. La solidarité est le maître mot d’une humanité réconciliée avec elle-même et je suis persuadé que si tous les êtres de bonne volonté mettaient en avant cette notion essentielle, on parviendrait à battre les diviseurs et autres esprits malins qui ont fait de la discorde leur fond de commerce.

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