Monday 9 July 2007

Destin cyclique

J’ai l’impression que mon pays, la Tunisie retient son souffle, et appréhende la période à venir. Le pays est conscient qu’il a atteint un palier critique de son histoire et de son développement, et du comportement de son peuple et de ses dirigeants dans les prochains mois, va dépendre son avenir tout au long de ce 21ème siècle. Ni plus ni moins, à mon humble avis.

Soit le pays se libère, et il sera sur les bon rails pour attaquer le nouveau siècle et millénaire dans les temps (un peu comme la Yougoslavie, l’Ukraine, la Géorgie, la Mauritanie, l’Afrique du Sud, le Chili, le Pérou etc., même si chaque pays est un exemple particulier), soit il est parti pour 10 ans encore avec B.A, et 30 ans avec son successeur, qui sera probablement de la même trempe. En gros, si ce n’est pas maintenant, au mieux ça ne sera pas avant le siècle prochain.

Il est assez ironique de voir comment l’histoire se répète, comment le temps s’amuse à nous faire tourner en rond, juste pour son propre plaisir, et celui de la clique présidentielle. Le chemin suivi durant 30 ans par la Tunisie entre son indépendance jusqu’au changement, ressemble étrangement à sa progression durant 20 ans, entre ce même changement jusqu’à nos jours. Dans les deux cas, un début dans l’euphorie, des prémices de démocratie et de libertés individuelles accordées, des réformes justes et porteuses et une santé économique encourageante. Puis c’est la stagnation, le contexte mondial difficile (guerres israélo-arabes d’un coté et conflits moyen-orientaux et terrorisme de l’autre) et la période creuse qui mets à mal les réalisations concrétisées. Le pays souffre mais a confiance en son avenir et en ses dirigeants. Et enfin, c’est la descente vers les abîmes, la montée de l’extrémisme islamiste (années 1980 puis années 2000) et la dégringolade vers le ridicule avec un cercle restreint de profiteurs toujours aussi assoiffés de gains faciles (on est passé de Wassila à Leila) et des couches sociales entières qui voient leur gagne pain se rétrécir de jour en jour.

Dans les deux cas, le peuple croyait avoir placé son destin entre des mains responsables qui l’ont non seulement trahi, et de la plus piteuse des manières, mais aussi giflé et torturé. Car au lieu de s’occuper de leurs concitoyens, les dirigeants et la famille présidentielle se sont occupés de leurs richesses et de leurs profits, sans aucun sentiment patriotique.

Et cerise sur le gâteau, nous nous acheminons doucement mais sérieusement vers la même mauvaise blague de la proclamation de la présidence à vie, comme ce fut le cas pour notre ancien président, H.B. Les hommes, le contexte, et les moyens ont changé, mais finalement, le résultat est flagrant : du pareil au même.

C’est le parlement tunisien qui décréta la présidence à vie de Bourguiba, tandis que c’est le peuple tunisien, lors d’un référendum aussi opaque que pervers, qui autorisa son actuel président à se présenter autant qu’il voudra, c'est-à-dire, jusqu’à la mort. Bourguiba ne lâcha le pouvoir que quand il ne put plus se nourrir par lui-même, et gageons que ça sera de même pour son successeur. Bourguiba aura conduit le pays jusqu’à la paralysie, et c’est apparemment vers cette situation que l’y dirige l’actuel résident du Palais de Carthage. Bourguiba poussa le culte de la personnalité jusqu’à penser (et déclarer) que la Tunisie c’est lui et lui, c’est la Tunisie. L’autre y va de sa petite touche romantique, en coloriant tout le pays en violet et en le garnissant partout de ses portraits et du chiffre 7, comme aux temps des rois et califes. Et Bourguiba fut la marionnette de ses proches, et c’est ce qui est en train de se passer maintenant, sous nos yeux indifférents, avec des clans qui se partagent les maigres recettes touristiques, douanières et industrielles du pays. Enfin, Bourguiba mourut pauvre (paix à son âme), tandis que l’autre mourra riche, très riche. Longue vie à B.A.

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